la matière ou du mouvement, ou ne peul recevoir
que de la géométrie la faible lumière qui lui permet
d’entrevoir quelques objets dans l’abîme de l’infini.
Philosophe autant que géomètre, M. D’Alembert sut
tirer une partie de sa gloire de ces recherches qui
ont été si souvent l’écueil des métaphysiciens, et
même des géomètres. Il a le premier appris aux mathématiciens à douter des principes du calcul des
probabilités, sur lesquels ils appuyaient avec trop de
confiance leurs savantes théories. La philosophie lui
doit la preuve de cette grande vérité, que les lois
de la mécanique sont une suite nécessaire de la nature
des corps. Souvent il a expliqué aux géomètres
des paradoxes où le calcul de l’infini les avait conduits ; tandis que, développant aux philosophes la
nature de l’infini géométrique, il les familiarisait
avec cette idée qui étonne toujours notre faiblesse,
et l’a si souvent confondue.
L’étude des lettres, qui n’avait été longtemps que le délassement de M. D’Alembert, devint pour lui une ressource nécessaire, lorsque ses organes affaiblis ne purent soutenir sans fatigue cette attention forte et continue qu’exigent les méditations mathématiques : son génie, comme il l’a prouvé dans ses derniers ouvrages, était toujours capable des mêmes efforts ; mais il ne pouvait plus les prolonger si longtemps. Nommé alors secrétaire de cette Académie, il la regarda comme une nouvelle patrie à laquelle il se dévoua tout entier ; les plus petits détails de ses fonctions étaient chers et importants à ses yeux ; il savait y plier, sans contrainte et sans dégoût, ce gé-