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TABLEAU GÉNÉRAL


des résultats communs pour toutes ces valeurs, en calculant seulement les unités de la chose qui est devenue leur mesure commune.

Mais il faut pour cela, ou choisir pour méthode des choses semblables qui puissent être comptées, ou une seule chose dont l’on puisse avoir constamment des quantités déterminées. Il faut de plus pouvoir supposer que ces choses semblables sont égales entre elles, que cette chose se retrouve toujours la même.

En effet, on se serait aperçu bientôt que, si un couteau vaut deux peaux, et qu’une hache en vaille vingt, on ne peut en conclure qu’une hache vaut dix couteaux, si ces peaux, qui servent de mesure commune, ne sont pas supposées égales entre elles.

Il peut arriver, comme dans cet exemple, que la chose prise pour mesure commune ne soit pas susceptible de cette constance ; et, dans ce cas, on a imaginé de prendre pour unité une de ces choses dans l’état de grandeur, de bonté, où elles se présentent le plus souvent dans les échanges réels. Ainsi, par exemple, la mesure commune sera une peau de castor à peu près de telle grandeur, un mouton à peu près de tel âge et de telle taille. C’est une espèce de valeur moyenne qui se forme naturellement, parce qu’on en sent le besoin. De là même on est parvenu à une espèce d’unité abstraite dont on a conservé le nom, même lorsqu’on est convenu de l’attacher à une chose d’une nature toute différente.

D’autres peuples ont imaginé de prendre pour mesure commune des coquillages qui ne peuvent être employés à aucun autre usage, mais qui acquiè-