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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 1.djvu/791

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FRAGMENT DE JUSTIFICATION.


mais à la majorité de l’Assemblée comme interprète du vœu national.

Soit que M. de Narbonne ne fût pas de cet avis, soit qu’il n’eût pas dans le conseil assez d’influence pour suivre ce plan, il ne réussit qu’à obtenir pour ses vues une majorité chancelante, formée d’une portion du parti populaire et d’une portion du parti ministériel. Son projet principal était de disperser les émigrés et de détruire par là un des principaux sujets de défiance contre le ministère. Le roi et le conseil parurent approuver ce projet pendant quelque temps ; leur langage se rapprocha de celui des amis de la liberté. Le message au roi de M. de Vaublanc, la déclaration du 29 décembre que j’avais rédigée [1], et surtout le serment du 14 janvier, proposé par M. Guadet, avaient montré dans l’Assemblée une sorte d’unanimité, ou du moins une majorité assez forte pour en imposer aux ennemis de la nation.

Mais bientôt le conseil abandonna une marche qu’il avait paru suivre un moment, dans la crainte de se trop démasquer. Il obtint de la cour de Coblentz une fausse promesse de disperser les émigrés ; tout retomba dans la langueur, et l’on profita, pour renvoyer M. de Narbonne, d’un moment où il avait choqué une portion des patriotes de l’Assemblée.

Peu de jours auparavant, on avait fait venir de Vienne une longue dépêche, où Léopold avait l’air de n’avoir de mauvaises intentions pour la France qu’en haine des Jacobins ; où il assurait que le roi

  1. Tome X, p. 253.