Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 10.djvu/153

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sur le préjugé, etc.

plus des lois pour que le commerce soit utile à la nation, mais pour que la nation fasse à ses frais la fortune des commerçants.

Si la capitale était placée au milieu d’un pays qui possédât exclusivement certaines manufactures, qui produisît, à l’exclusion de la plupart des autres provinces, une espèce particulière de denrée précieuse, alors le progrès de cette industrie, de cette culture, prendrait la place de l’intérêt national.

Voulez-vous qu’il règne dans un pays une politique fondée sur des principes libéraux ; voulez-vous que les droits naturels des hommes, que les maximes éternelles de la justice soient la base unique de toutes les lois, faites que l’esprit de commerce ne domine point dans le lieu d’où elles émanent. Dans une ville, dans un pays où le commerce, proportionné aux besoins, n’occupe qu’une partie des habitants, où il existe pour les citoyens, il adoucit les mœurs, il produit les vertus domestiques ; mais dans les villes où il est l’occupation générale, où il domine, où les citoyens existent pour lui, il devient avide et tyrannique.

La liberté du commerce et de l’industrie, en leur permettant de se répandre avec plus d’égalité, de se distribuer suivant le vœu de la nature et les besoins des hommes, préservera de ce danger. Ce que je viens de dire du commerce serait également vrai des militaires de terre ou de mer, des ministres de la justice, des gens occupés des opérations de banque, que, malgré une liaison nécessaire, il ne faut pas confondre avec les commerçants. Toute