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sur le préjugé, etc.

propriété, de pouvoir, par son travail, par son industrie, subvenir à ses besoins, c’est-à-dire, que l’intérêt de tous est d’avoir de bonnes lois ; et certainement si, en réunissant des pouvoirs qui doivent être partagés, l’Étal est mal gouverné, la capitale ne le sera pas mieux que le reste de l’empire ; on n’y rendra pas la justice d’une manière impartiale et prompte, si elle est lente et partiale pour les provinces, qu’on obligerait à y aller chercher les jugements. Les richesses que cette réunion vicieuse de pouvoirs y amènerait ne seront pas un bien très-sensible pour les anciens habitants, parce que, si le nombre des gens aisés augmente, celui des hommes vivant de leur travail croît aussi dans la proportion des salaires que cette augmentation leur assure.

De même, il n’est pas de l’intérêt des provinces de séparer des pouvoirs qui doivent être uniques ; car alors elles seront plus mal gouvernées ; et un peu d’argent qu’elles conserveraient, mais toujours avec ceux que cet argent doit faire vivre, ne serait pas pour elles un grand avantage.

Les pouvoirs doivent donc être séparés ou réunis de manière qu’ils remplissent avec le plus de justice, de lumière, d’économie, les fonctions qui leur sont confiées. C’est uniquement d’après cette condition, et non suivant les vues d’une utilité locale, le plus souvent chimérique, que de sages législateurs chercheront à les distribuer.

Sous un autre point de vue, cette réunion dans un même lieu des hommes les plus éclairés dans tous les genres, de ceux qui aspirent aux places les plus