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sur le préjugé, etc.

plus de zèle pour le bien public que de talent pour obtenir des places ?

Ainsi, les lois contraires à l’égalité ne peuvent être bonnes pour les provinces en nuisant à la capitale, ni utiles à la capitale en nuisant aux provinces. Ainsi, c’est à la nature, c’est à la volonté libre des individus qu’il faut laisser le soin de fixer la grandeur, la richesse du chef-lieu de l’empire, comme de toute autre ville.

On pourrait demander si la capitale, étant trop petite, il ne faudrait pas chercher à l’agrandir. Non, sans doute ; il faut y placer tous les établissements qu’il est utile de réunir dans le centre commun, et bientôt les hommes que ces établissements attirent s’y réuniront d’eux-mêmes.

On peut demander s’il ne faut pas s’occuper de diminuer une capitale trop grande. Je répondrai que, bien loin d’accélérer ce changement, il serait sage de le rendre presque insensible, parce qu’une dépopulation trop rapide de la capitale deviendrait un mal pour les provinces, à qui elle renverrait, non les hommes distingués qu’elle renferme, mais ceux qui n’y subsistent que par de mauvais moyens ; non les ouvriers qui par leur conduite et leur habileté sont sûrs de trouver du travail, mais ceux qui par leur paresse, leurs vices ou leur faiblesse, ne sont employés que dans les cas de nécessité.

Ainsi, dans les circonstances où naturellement la capitale doit encore augmenter, il n’est pas utile aux provinces d’y mettre obstacle ; et si, par un changement dans la distribution des pouvoirs, elle