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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 10.djvu/164

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sur le préjugé, etc.

par cette suspension de toute confiance, suite nécessaire de l’état des finances et de l’incertitude où, dans ces grands changements, presque toutes les personnes riches ont été sur ceux qu’éprouverait leur fortune. Comme la crainte, l’humeur, ou l’amour du repos ont écarté de la capitale un assez grand nombre de familles opulentes, ils se sont exagéré ce nombre, et ont regardé cette retraite momentanée comme une absence éternelle. D’autres ont cherché à accréditer cette opinion dans l’espérance de refroidir par là le zèle des habitants de Paris.

Heureusement, s’ils ont réussi à leur inspirer des craintes, ils n’ont pu diminuer leur enthousiasme pour la constitution, et ces dignes citoyens ont montré qu’ils préféraient la liberté à la richesse, et qu’ils savaient supporter le malheur, mais non la servitude. L’idée qu’ils devraient perdre beaucoup a pu les affliger, mais n’a pu, ni les décourager, ni changer leurs opinions.

Cependant, il importe à la nation entière de connaître jusqu’à quel point cette opinion est fondée. Une partie quelconque d’un État ne peut éprouver un dépérissement subit sans que le reste n’en partage les pertes.

Paris, par exemple, ne pourrait déchoir sans que le pays qui l’entoure ne perdit une partie de sa population et de sa richesse, puisqu’il doit au voisinage seul de Paris, et sa prodigieuse activité, et les capitaux avec lesquels il a établi une culture florissante dans des terrains peu favorisés de la nature.