Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 10.djvu/169

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
157
sur le préjugé, etc.

Ainsi l’enseignement public des sciences politiques dans la capitale, non pour les enfants (celui-là doit être commun à toute la nation), mais pour les jeunes gens déjà formés, pour ceux que bientôt le suffrage public peut appeler aux places importantes, serait un préservatif utile contre la corruption de principes qui pourrait se glisser dans les législatures. Cette censure, indirecte et grave, exercée par les maîtres, répétée par les disciples, contiendrait ceux qui, à l’aide de sophismes brillants, voudrait établir des maximes dangereuses.

Le commerce des livres, débarrassé de la censure, va devenir pour Paris une ressource presque universelle. On sait que les ouvrages qui ont eu le plus de lecteurs en France et chez les étrangers, n’ont jamais été imprimés à Paris, où Font été seulement lorsque, se trouvant déjà dans toutes les bibliothèques, on a eu l’esprit de sentir qu’il était inutile de les défendre. On sait que nos inquisiteurs[1] n’ayant toléré qu’un petit nombre d’imprimeries, il en était résulté une augmentation de prix qui ne permettait de soutenir la concurrence ni avec les étrangers, ni avec les provinces. Le peuple ne lisait pas les journaux, dont la main timorée d’un censeur effaçait tout ce qui aurait pu l’intéresser, tout ce qu’il pouvait entendre ; on avait porté la précaution jusqu’à en réduire le nombre dans les limites les plus

  1. Un d’eux disait qu’il ne faudrait en France d’autre imprimerie que l’Imprimerie royale. Un autre, que l’on devait se borner aux autours du siècle de Louis XIV, puisqu’on ne ferait pas mieux.