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de la circulation des subsistances.

craindre, avec raison, des manœuvres dangereuses. II leur aurait été trop facile d’exciter des inquiétudes, de causer des disettes locales et momentanées. Ces manœuvres, qu’il est absurde de craindre dans les circonstances ordinaires où l’amour seul du gain pourrait les inspirer, parce qu’il ne peut en résulter de profit pour les hommes avides qui les tenteraient ; ces manœuvres auxquelles des ennemis étrangers ne se livreraient pas, quelque pervers qu’ils pussent être, parce qu’elles ont besoin d’un foyer de troubles intérieurs ; ces mêmes manœuvres pourraient aujourd’hui produire des effets funestes. Aussi ceux qui, dans d’autres temps, ont parlé de ces terreurs avec le plus de mépris, savent qu’en ce moment elles ont cessé d’être chimériques : on a pu dire de ne pas craindre, et cependant proposer aujourd’hui de multiplier les précautions, sans avoir changé d’opinion ou de principes.

Mais, puisque le transport par mer est nécessaire pour établir la circulation des subsistances entre les départements, et que, par conséquent, il est impossible de fermer absolument les ports ; et puisqu’on ne peut, sans une injustice évidente, une violation ouverte de l’égalité des droits, ne pas permettre aux grains de circuler dans le voisinage des frontières, on n’a d’autres moyens de prévenir la sortie à l’étranger, que d’assujettir ceux qui sortent par les ports, ceux qui se transportent près des frontières, à des formalités qui garantissent qu’ils resteront dans l’intérieur delà France, ou qu’ils y rentreront par un autre port.