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des pouvoirs politiques

des applications du droit naturel, la majorité n’aura rien abandonné que les formes, les combinaisons des principes reconnus par elle-même, et les aura abandonnées seulement par l’impossibilité de discuter elle-même ces formes, d’analyser ces combinaisons.

Ainsi, un corps législatif n’exerce pas un véritable pouvoir ; il n’est, pour les lois soumises à l’acceptation, qu’un législateur collectif : c’est Solon ou Lycurgue, remplacés par une assemblée.

Quant aux autres lois, leur autorité résulte encore de l’opinion de la majorité, qui, en établissant cette forme de les préparer, les a revêtues d’avance de son acceptation, parce qu’elle a jugé cette acceptation antérieure utile et nécessaire.

Ainsi, la majorité, obéissant à ces lois, quand même elle les désapprouve, obéit encore à sa propre opinion, de la même manière que la minorité n’obéit qu’à sa raison, lorsqu’elle cède à l’opinion de la majorité, qui y est contraire.

Entre la loi et la chose qui doit être faite d’après elle, ou l’individu qui doit s’y soumettre, se trouve la fonction de déclarer que telle est, dans telle circonstance, l’application de la loi, c’est-à-dire, la fonction de faire un syllogisme dont la loi est la majeure, un fait plus ou moins général, la mineure, et la conclusion, l’application de la loi. Par exemple, chaque citoyen sera tenu de contribuer à la dépense nécessaire pour les besoins publics, proportionnellement au produit net de sa terre ; voilà une loi telle dépense doit faire partie des besoins publics ;