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des pouvoirs politiques

ces classes, offensera moins les yeux de ceux qui n’osent prétendre à la passer ; mais on ne peut parvenir à en éviter les effets funestes, comme les mauvais choix, la haine des vertus, des lumières et des talents, et surtout cette défiance ennemie de la tranquillité publique, si, par de fréquentes élections, on ne donne point à la classe gouvernée, sur celle qui gouverne, un empire dont l’exercice peut seul la consoler.

C’est en cela, peut-être, que consiste le plus grand avantage des élections immédiates. En effet, c’est uniquement par une sorte de fiction qu’on regarde comme choisi par soi-même celui dont on n’a réellement nommé que les électeurs ; qu’on peut le regarder comme son propre ouvrage ; qu’on se console ou qu’on se rassure par l’idée de pouvoir, par un refus de son suffrage, le punir d’avoir abusé d’une première confiance.

Et, s’il existait un moyen pour que, dans ces élections immédiates, le peuple choisît réellement, pour que ce sentiment de préférence qu’on accorde aux hommes de son choix pût exister dans l’âme de la majorité, c’est alors que l’on verrait s’établir une confiance réelle, que de vagues calomnies ne pourraient plus l’ébranler.

Il faudrait donc, non-seulement avoir une bonne méthode d’élection, c’est-à-dire, une méthode dont le résultat exprimât vraiment le vœu de la majorité ; mais il faudrait encore distribuer les élections de manière que chaque masse de citoyens pût ne balancer ses choix qu’entre des hommes connus du