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cette éloquence violente et verbeuse, souvent compagne de l’ignorance, si les élections étaient immédiates, si même les assemblées des électeurs étaient chargées d’autres fonctions publiques. Mais vous avez établi, Messieurs, et que les élections ne seraient pas immédiates, et que les assemblées d’électeurs ne s’occuperaient que d’élire ; et ces sages décrets ont rendu inutile la précaution que la crainte des choix, faits en tumulte, vous avait sans doute inspirée. Nous ajouterons à ces motifs une preuve de fait bien frappante, que la vérité peut mettre sous vos yeux, sans craindre de paraître avoir emprunté le langage de la flatterie.

Lors de la convocation de votre assemblée, les députés des communes ont été nommés par des électeurs, mais dans des assemblées où la confection des cahiers pouvait faire naître des partis, et donner à l’éloquence populaire une influence dangereuse. A cette même époque, deux grandes corporations, la noblesse et le clergé, ont été presque partout séparées de la généralité des citoyens. Ces corporations étaient très-peu nombreuses, si on les compare à la totalité des habitants du royaume ; mais elles l’étaient beaucoup, si on les compare seulement au nombre des hommes que leur instruction rend réellement éligibles.

Enfin, on n’avait exigé aucune condition pécuniaire. Cependant, Messieurs, ce sont ces mêmes élections qui ont donné au peuple français les créateurs de sa liberté, les restaurateurs de ses droits, qui ont appelé dans l’assemblée des représentants de la nation tant