avaient appris à bien juger les hommes et les
talents, jeta les jeux sur Fontenelle ; et jamais
peut-être personne ne fut plus digne d’une telle
place. On sait avec combien de clarté, et même
d’agrément, il parlait la langue des sciences les
plus abstraites ; il connaissait et leur utilité directe,
et cette autre utilité cachée aux yeux du
vulgaire, qui consiste à produire dans les opinions
une révolution insensible. Embrassant
d’un même coup d’œil l’économie de toutes les
sciences, leurs liaisons et leur influence réciproque,
il savait également admirer le génie qui crée,
et estimer les talents inférieurs, qui, destinés à
éclaircir les détails des sciences, sont peut-être
aussi nécessaires à leurs progrès que le génie
même. Ami de l’ordre, comme d’un moyen pour
conserver la paix ; aimant la paix, comme son
premier besoin ; ne pouvant exciter la jalousie
dans une compagnie où la réputation acquise
par les sciences a le premier rang ; chérissant
trop son repos pour abuser de l’autorité ; convaincu
que la liberté est de tous les encouragements
le plus utile aux sciences ; également incapable
enfin d’être égaré, soit par l’amitié, soit
par la haine, il convenait à cette place par son
Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/17
Cette page n’a pas encore été corrigée
V
AVERTISSEMENT.