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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/261

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ÉLOGE DE M. DE JUSSIEU.


de la capitale, ni la considération attachée aux sciences, et dont il avait vu jouir son frère en France et chez les étrangers, ni la gloire à laquelle ses heureuses dispositions lui permettaient d’aspirer, n’avaient pu faire naître en lui des prétentions plus relevées.

Heureusement pour la botanique, à peine eut-il essayé la pratique de la médecine, qu’il éprouva une impossibilité entière de continuer l’exercice de cette profession : trop sensible aux maux de ses malades, il souffrait de leurs peines ; elles lui causaient de violentes palpitations de cœur ; l’humanité faisait sur lui les effets que produit à peine l’amitié sur les hommes d’une sensibilité commune.

Il fallait cependant à M. de Jussieu un état qui lui tînt lieu de fortune : il l’obtint de ses talents, de la réputation de son frère et de la justice de M. Vaillant. Ce botaniste célèbre était alors démonstrateur au Jardin du roi ; il avait pu espérer d’y remplacer M. de Tournefort dans le titre de professeur, et la place avait été donnée à M. de Jussieu l’aîné : ce choix devait d’autant plus blesser M. Vaillant, que M. de Jussieu l’aîné suivait les idées et les vues de M. de Tournefort, dont M. Vaillant avait plus d’une fois combattu les opinions, et qu’ainsi la préférence accordée à M. de Jussieu semblait l’avoir été en même temps aux idées de M. de Tournefort. Cependant, en vivant avec M. de Jussieu, M. Vaillant lui pardonna bientôt. Instruit des talents et de la science prématurée du jeune Bernard de Jussieu, il fut le premier à proposer de l’appeler à Paris, et à destiner