autre raison : il sentait avec peine la supériorité de
Descartes, et même de Fermât ; ne pouvant prétendre
au premier rang, il voulait du moins que ce
mystère cachât son infériorité. Peut-être même
espérait-il trouver, parmi les envieux de Descartes, des
hommes qui lui donneraient la préférence : car souvent
on se plaît à élever un mérite inconnu, qu’on
peut mettre à telle place qu’on veut sans blesser ses
propres prétentions, tandis qu’on rabaisse les talents
dont l’éclat nous humilie. Cette vanité malentendus
nuisit à la réputation et au repos de Roberval.
S’il avait étudié la géométrie de Descartes, au lieu de
la combattre, il aurait été le premier parmi ses
disciples ; et cette gloire eût mieux valu sans doute
que le triste honneur d’avoir été son ennemi plutôt
que son rival. Pourquoi faut-il que tant d’hommes,
faits pour contribuer aux progrès des sciences,
perdent, à combattre un homme supérieur, les forces
qu’ils ne devraient employer que contre la résistance
de la nature ? Pourquoi faut-il qu’ils sacrifient
si misérablement, à une petitesse d’amour-propre,
l’intérêt des sciences et celui de leur véritable gloire ?
Roberval mourut en 1676. Ses ouvrages, recueillis par l’abbé Gallois, son ami, sont imprimés dans les anciens Mémoires de l’Académie. Dans ses méthodes, presque toujours obscures et embarrassées, on ne peut cependant méconnaître l’empreinte du génie.
Malgré un amour-propre facile à blesser, et qui ménageait peu celui des autres, Roberval eut des amis. Sans parler du père Mersenne, qui, ne pou-