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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/522

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ÉLOGE M. TRONCHIN.


et bientôt l’estime de Boerhaave, des succès soutenus, et ce don secret que la nature lui avait donné d’obtenir la confiance, le mirent à la tête des médecins d’Amsterdam. Il y épousa une fille de la maison de Witt, petite-nièce de ce célèbre Jean Witt qui a été du petit nombre des hommes d’État dont les écrits et le talent pour les sciences ont prouvé que ce qu’ils ont fait de grand dans la politique n’était pas l’ouvrage du hasard et des circonstances ; ministre habile et zélé républicain, sous l’administration duquel la Hollande se vit la rivale de l’Angleterre et l’arbitre de l’Europe, et qui périt par la fureur du même peuple dont il avait augmenté la puissance et fondé la liberté. Le nom de Witt était, en Hollande, le cri sacré du patriotisme ; attaché à ce nom respectable, M. Tronchin eût cru le profaner en acceptant la place du premier médecin d’un stathouder ; il la refusa, et quitta Amsterdam peu de temps après l’établissement d’un stathoudérat héréditaire, pour aller jouir, dans sa patrie, du spectacle de l’égalité républicaine.

Le conseil de Genève lui donna le titre de professeur honoraire en médecine, en ne lui imposant aucun devoir ; cependant il ne se crut pas dispensé de faire des leçons. Il y cherchait surtout à dissiper les préjugés dont la médecine était infectée, à désabuser de la fausse science qui servait de base à la pratique, à inspirer aux médecins plus de défiance de leurs lumières, et à leur donner des doutes salutaires sur la certitude de leur art. Ces leçons eurent le sort qu’elles devaient avoir ; elles furent