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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/612

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ÉLOGE DE M. DE MONTIGNI.


pour procurer au petit pays de Gex, séparé de la France par des montagnes, la liberté de racheter, avec un impôt facile à lever, des droits que sa position et sa pauvreté lui rendaient insupportables, par les frais qu’exigeait en pure perte l’exercice de ces droits. M. de Montigni était digne de seconder de telles vues. Pendant treize ans entiers, ni lui, ni M. de Voltaire, ne cessèrent de s’en occuper ; et le pays de Gex obtint enfin, en 1775, cette grâce, qui répandit la sérénité et le bonheur sur les dernières années d’un grand homme.

En 1763, M. de Montigni s’occupa d’un travail encore relatif aux contestations et aux plaintes, suites trop nécessaires de tout impôt sur les consommations. Il s’agissait des droits sur l’esprit-de-vin, et de la manière d’avoir égard dans les droits d’entrée aux différents degrés de force de cette liqueur. Les fermiers généraux et les commerçants s’en étaient rapportés à sa décision ; et si cette confiance des négociants faisait honneur à M. de Montigni, celle des fermiers généraux ne leur en faisait pas moins à eux-mêmes. Il proposa de se servir d’un aréomètre fort simple, d’une exactitude suffisante, et gradué d’après des mélanges artificiels d’eau et d’esprit-de-vin, faits dans différentes proportions. Il est de l’intérêt public de mettre dans la perception des droits de ce genre une précision physique, même minutieuse, et d’employer une méthode assez simple pour être saisie par ceux qui doivent les payer ; c’est la seule digue que l’on puisse opposer à l’arbitraire, qui sait briser ou éluder toutes les autres.