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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/651

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ÉLOGE DE M. DUHAMEL.


ment spontané de grosses toiles imbibées d’huile et fortement serrées : des toiles ainsi préparées avaient souvent causé des accidents ; si l’on était assez heureux pour les prévenir, on les cachait, moitié par ignorance sur leur véritable cause, moitié dans la crainte de n’être pas cru et d’essuyer des reproches. Si l’incendie n’avait pas été prévenu, alors la voix publique accusait la négligence de ceux qui étaient chargés de ces dépôts ; plus souvent on soupçonnait quelque crime ; car le soupçon d’un crime est, chez le vulgaire, la première explication qui se présente pour suppléer à l’ignorance des causes naturelles, et si souvent c’est une injustice, l’humanité ne l’a malheureusement que trop méritée. L’observation de M. Duhamel était donc utile pour prévenir des soupçons injustes et pour engager à prendre des précautions ; cependant, plus de vingt ans après l’impression de son mémoire, deux accidents, causés en Russie par les embrasements spontanés de toiles préparées, furent encore attribués à la trahison. L’impératrice seule devina que la cause en était naturelle, et les expériences faites par ses ordres ont confirmé ce qu’avait prouvé le physicien français.

On sera étonné sans doute qu’un seul homme ait suffi à tant de travaux ; mais M. Duhamel avait un frère, qui, fixé dans la terre de Denainvilliers, dont il portait le nom, partageait son temps entre les soins de la bienfaisance et l’observation de la nature, n’était occupé que de soulager les habitants de ces terres, et d’aider son frère dans ses travaux. Pendant