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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/661

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ÉLOGE DE M. DUHAMEL.


nos séances, on s’apercevait qu’il n’y assistait plus avec le même intérêt. Enfin, le 21 juillet dernier, il fut frappé d’une apoplexie presque en sortant de l’Académie, et mourut après vingt-deux jours d’assoupissement, sans avoir éprouvé ni des douleurs vives, ni le sentiment, souvent si pénible, de la nécessité de mourir.

Telle fut la fin d’un des hommes de ce siècle qui ont le plus contribué à rendre les sciences respectables, surtout aux yeux de ceux qui ne peuvent en juger que par leurs effets immédiats sur le bonheur des hommes. Sans avoir ces qualités brillantes qui forcent l’admiration, il jouit d’une réputation que ses travaux et sa conduite avaient méritée : les étrangers le recherchaient avec empressement, et son nom était dans toute l’Europe, pour les voyageurs, une des recommandations les plus honorables et les plus efficaces. Sa carrière, utile, glorieuse et paisible, est une des plus détireuses que l’histoire des sciences puisse présenter : il fera époque dans cette histoire, parce que son nom s’est trouvé lié avec cette révolution dans les esprits qui a dirigé plus particulièrement les sciences vers l’utilité publique, et que personne n’y a plus contribué que lui.

Sans doute cette révolution sera durable ; l’idée du bien général des hommes sera le guide des savants dans leurs recherches ; ils sauront la préférer peut-être à leur gloire même, et les hommes plus éclairés sauront aussi distribuer la gloire d’une manière plus utile à leurs intérêts. Mais il est rare qu’on puisse rester dans de justes bornes, et qu’en renon-