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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/202

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ÉLOGE DE M. DE COURTIVRON.


science qui fait entreprendre des travaux longs et pénibles, pour en faciliter aux autres l’étude ou les applications. Si on y aperçoit souvent combien il avait approfondi plusieurs parties des mathématiques, c’est uniquement dans les circonstances où il n’aurait pu le cacher sans nuire à la facilité, à la simplicité qu’il voulait donner à ses solutions. Ainsi, même dans un ouvrage de géométrie, au milieu des calculs et des formules, un savant laisse échapper des traits qui peignent son âme et son caractère. Dans ces mémoires, M. de Courtivron fait un usage presque continuel de l’analyse algébrique ; et on doit lui savoir gré d’avoir connu toute l’utilité de cette méthode dans un temps où l’on ne pouvait encore que la deviner.

Les savants se renferment rarement dans les limites d’une seule science ; ils se livrent presque toujours à d’autres études, dont la liaison avec leur étude principale leur inspire le goût et leur fait sentir l’utilité. Quelquefois même ils ne cherchent dans ce nouveau travail qu’un délassement nécessaire à des hommes pour lesquels l’habitude d’exercer leur raison rend insipide tout ce qui n’est que mouvement, mode ou dissipation. Mais souvent celui qui vit dans la capitale, loin de s’enorgueillir de l’étendue ou de la variété de ses connaissances, cherche à la cacher. Comme il sent, par sa propre expérience, combien l’homme qui n’a cultivé une science que par intervalle est presque nécessairement inférieur à ceux qui en ont fait l’objet de leurs méditations habituelles, il ne veut pas se montrer à