donné de porter l’humilité jusqu’à souffrir avec patience
une injustice qui aurait été si peu méritée.
Cette idée, qui l’occupait trop souvent, était une des
causes de son humeur, et la seule qui ne fût pas une
suite de ses vertus, de sa haine pour l’intrigue et
pour la charlatanerie, haine qui les lui faisait voir
où elles n’étaient pas, d’un amour pour la justice et
pour la vérité, aussi facile à blesser que pourrait
l’être une passion dominante. Ce dernier sentiment
lui faisait regarder toute espèce d’éloges, et même
les éloges académiques, comme de véritables mensonges.
Vous allez bien mentir, me disait-il quelquefois,
en me parlant d’une de nos séances publiques,
et il ajoutait : quand il s’agira de moi, je ne veux que la vérité. Ce désintéressement, si rarement sincère, était dans son âme, et en remplissant ici ses intentions à la rigueur, je lui rends l’hommage qu’il eût
le plus désiré. Il cherchait si peu à paraître meilleur
qu’il n’était, que ses défauts frappaient ceux qui le
connaissaient à peine, tandis que ses amis seuls connaissaient toutes ses vertus. Peut-être y a-t-il, dans
cette assemblée même, plusieurs personnes qui,
n’ayant connu M. Guettard que par quelques réponses
brusques ou même dures, par quelques
traits d’humeur, seront étonnées d’apprendre que
cet homme, en apparence si sévère, si difficile,
forcé par sa position à vivre isolé, avait adopté la
famille très-nombreuse d’une femme qui le servait,
en faisait élever tous les enfants, et veillait lui-même
sur les plus petits détails de leur éducation ; qu’il ne
pouvait voir un malheureux, non-seulement sans
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ÉLOGE DE M. GUETTARD.
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