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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/268

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ÉLOGE DE M. L’ABBÉ DE GUA.


tions : aussi son expérience le força-t-elle bientôt d’avouer que îles lois obscures et des formes compliquées sont un impôt un peu moins volontaire et beaucoup plus onéreux que les loteries.

Cependant, au milieu de ses malheurs, il vit s’élever quelques jours sereins : en 1783, quoique vétéran depuis trente-sept ans, l’Académie le choisit comme un des trois sujets qu’elle présente pour les places de pensionnaires ; cette marque d’estime qu’il reçut d’une compagnie qui lui était toujours chère, fut pour lui un des événements les plus heureux de sa vie.

Il reprit en un instant, malgré son âge et ses infirmités, son assiduité à nos assemblées, son ardeur pour la géométrie, son zèle pour les fonctions académiques. Cette sensibilité, si touchante dans un vieillard que ses talents et sa pauvreté rendaient respectable, eut sa récompense.

Lorsqu'en 1785 le roi créa deux nouvelles classes dans l’Académie, M. l’abbé de Gua fut pensionnaire dans celle d’histoire naturelle, science qu’il avait longtemps cultivée : mais il ne jouit pas longtemps de cet avantage ; chaque hiver il voyait, depuis plusieurs années, ses forces s’affaiblir et ses infirmités s’augmenter ; enfin, le 2 juin de cette année, une maladie assez longue termina ses souffrances et ses malheurs. C’est au milieu de l’Académie, où il s’était fait porter malgré sa faiblesse, qu’il ressentit les premières atteintes de cette maladie, et pendant toute sa durée, le seul sentiment qui l’occupât dans les moments d’espérance, était le désir de se retrouver au milieu de nous.