que leurs lumières ou leur franchise rendaient odieux
aux gens qui disposaient alors de la conscience du
monarque. Ils n’osaient ni offenser ni attaquer un
magistrat qui, instruit par sa place des détails de
leurs intrigues, aurait pu les déshonorer ou les
perdre ; et il se servit de cette crainte pour leur arracher quelques victimes. M. de Fontenelle fut la plus
illustre ; le père le Tellier voulait le punir d’avoir
osé, dans l’histoire des Oracles, combattre l’opinion
d’un jésuite. Une plaisanterie échappée à la jeunesse
du philosophe, oubliée depuis vingt ans, servit à
cacher le véritable motif de la persécution, et, sans
le courage de M. d’Argenson, lui eût coûté la liberté,
le repos, et peut-être la gloire que dans la suite il
acquit par ses paisibles travaux.
Le magistrat qui a conservé M. de Fontenelle à l’Académie des sciences ne doit jamais être oublié d’elle : ce n’est pas une gloire indigne d’un homme d’État, que d’avoir rendu à la nation un philosophe dont les ouvrages devaient l’honorer et l’instruire. A peine, dans l’éloge de M. d’Argenson, le secrétaire de l’Académie osa-t-il faire entendre ce qu’il lui devait ; le persécuteur n’existait plus, mais l’esprit de persécution vivait encore, et M. de Fontenelle fut obligé de laisser à ses successeurs le soin d’acquitter la dette de sa reconnaissance, dans un siècle plus éclairé, pins libre et plus heureux.
Le père de M. le marquis de Paulmy fut chargé du département des affaires étrangères au milieu d’une guerre générale, la seconde que les prétentions à la succession de la maison d’Autriche eussent allumée