Aller au contenu

Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/271

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
259
ÉLOGE DE M. DE PAULMY.


que leurs lumières ou leur franchise rendaient odieux aux gens qui disposaient alors de la conscience du monarque. Ils n’osaient ni offenser ni attaquer un magistrat qui, instruit par sa place des détails de leurs intrigues, aurait pu les déshonorer ou les perdre ; et il se servit de cette crainte pour leur arracher quelques victimes. M. de Fontenelle fut la plus illustre ; le père le Tellier voulait le punir d’avoir osé, dans l’histoire des Oracles, combattre l’opinion d’un jésuite. Une plaisanterie échappée à la jeunesse du philosophe, oubliée depuis vingt ans, servit à cacher le véritable motif de la persécution, et, sans le courage de M. d’Argenson, lui eût coûté la liberté, le repos, et peut-être la gloire que dans la suite il acquit par ses paisibles travaux.

Le magistrat qui a conservé M. de Fontenelle à l’Académie des sciences ne doit jamais être oublié d’elle : ce n’est pas une gloire indigne d’un homme d’État, que d’avoir rendu à la nation un philosophe dont les ouvrages devaient l’honorer et l’instruire. A peine, dans l’éloge de M. d’Argenson, le secrétaire de l’Académie osa-t-il faire entendre ce qu’il lui devait ; le persécuteur n’existait plus, mais l’esprit de persécution vivait encore, et M. de Fontenelle fut obligé de laisser à ses successeurs le soin d’acquitter la dette de sa reconnaissance, dans un siècle plus éclairé, pins libre et plus heureux.

Le père de M. le marquis de Paulmy fut chargé du département des affaires étrangères au milieu d’une guerre générale, la seconde que les prétentions à la succession de la maison d’Autriche eussent allumée