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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/279

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ÉLOGE DE M. DE PAULMY.

La mort prochaine du roi allait, suivant un usage trop constant, livrer au trouble, à la dissension, peut-être à la guerre, cette république de nobles, tyrans d’un peuple esclave, longtemps redoutable à ses voisins, alors réduite à dépendre d’eux, quelquefois brillante au dehors, lorsque la bravoure d’une cavalerie bien armée décidait des succès militaires, toujours malheureuse et agitée dans l’intérieur par l’ignorance des vrais principes de la liberté, et par cet esclavage d’un autre peuple qui, chez les anciens comme chez les modernes, a ôté à toutes les républiques qui l’ont connu leur repos, leur liberté et leur puissance. Les liens étroits de la parenté, la reconnaissance, le souvenir des malheurs d’une longue guerre, fruit de leur alliance, tout engageait les cours de Vienne et de Versailles à désirer de mettre, sur la tête du fils du roi mourant, une couronne qui n’avait été, pour sa famille comme pour son peuple, qu’une source d’humiliations et de désastres, mais qui perpétuait dans la maison de Saxe ce titre de roi, si cher aux souverains, même lorsqu’il n’emporte avec lui aucune puissance réelle. La Russie, à qui cette maison avait dû cette même couronne deux fois, venait d’abandonner ses intérêts. L’Europe, fatiguée d’une guerre longue et sanglante, n’avait plus ni trésors ni sang à prodiguer pour cette querelle. La France et l’Autriche ne pouvaient opposer que des négociations aux troupes russes, et au nom de Frédéric entouré de ses armées et de l’éclat de ses victoires : il fallut céder et se borner à tâcher d’éclairer sur son danger la