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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/282

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ÉLOGE DE M. DE PAULMY.


du théâtre : tels sont les objets traités par M. de Paulmy. Tous ne sont pas également intéressants, tous n’ont pas une utilité réelle, mais tous excitent cette curiosité naturelle, même pour les faits minutieux, lorsqu’ils peignent les mœurs ou l’esprit des différents peuples et des différents siècles.

Nous devons à M. de Paulmy l’idée de la Bibliothèque des romans ; lui-même y travailla et y inséra plusieurs extraits d’anciens romans, ou plutôt des romans nouveaux, faits d’après le canevas des anciens. Cet ouvrage est moins futile que son titre ne paraît l’annoncer. Souvent c’est dans les romans, autant que dans l’histoire ou dans les livres philosophiques, que l’on peut apprendre à connaître l’opinion commune, la morale usuelle, l’esprit social du peuple pour lequel ils ont été écrits. Réunis aux livres des historiens, aux ouvrages des philosophes, ils achèvent d’éclairer sur l’état de l’esprit humain dans chaque siècle, et complètent son histoire, la seule vraiment utile, ou plutôt celle à laquelle il faut ramener et réduire toutes les autres, si on veut qu’elles soient d’une utilité réelle. Cette exagération qui trompe l’imagination et le cœur, lors même qu’elle ne les corrompt pas ; ces idées d’un bonheur hors de la nature, qui rendent insipide ou nous empêchent de saisir celui qu’elle a mis auprès de nous ; ce monde imaginaire, si différent du monde réel, où la lecture des romans nous transporte et nous fait vivre, peuvent la rendre dangereuse pour ceux qui n’y cherchent qu’à flatter ce penchant si naturel à l’homme, de porter ses espérances au delà des bornes