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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/300

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ÉLOGE DE M. BOUVART.


point assez pour sentir que ces faiblesses des malades doivent être regardées comme des accidents de la maladie, et les ménagements qui pourraient adoucir leurs peines, comme des remèdes qui contribuent à la guérison. Cependant, comme il était juste, on le trouvait plus inexorable encore pour les parents ou les amis des malades : il ne concevait pas comment des personnes qui ne savent rien en médecine, peuvent se permettre de proposer des remèdes, d’indiquer un traitement, d’exiger qu’un médecin leur développe des raisons qu’ils ne peuvent comprendre, il était blessé de ces questions importunes qui, du moins lorsqu’elles étaient dictées par un intérêt réel, auraient mérité son indulgence. Sa philosophie eût dû lui apprendre que la médecine n’est pas le seul objet sur lequel on se permette de parler et de juger sans entendre, et que cette manie qui excitait sa colère, est un de ces vices généraux de la nature humaine, auquel il faut savoir pardonner pour son propre repos, comme par justice. Le caractère de M. Bouvart le rendait plus propre à traiter les maladies violentes où le malade est plus soumis, les témoins moins raisonneurs, l’emploi des remèdes plus certain, la marche du médecin plus hardie, plus décisive, et la terminaison plus rapide. Dans les maladies chroniques, rarement la patience de M. Bouvart ou celle du malade durait-elle assez longtemps pour qu’il pût voir le succès de son traitement.

Il regardait le talent pour la médecine et les connaissances expérimentales qu’elle exige, comme des