Aller au contenu

Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/308

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
296
ÉLOGE DE M. DE LASSONE.


et qui étaient d’un avis opposé, en ne parlant cependant que île ce qu’ils avaient vu.

M. de Lassone décida cette question ; il expliqua pourquoi la substance pulpeuse avait échappé à Ruisch, et pourquoi cette même substance avait présenté à Malpighi l’apparence illusoire de véritables membranes.

Il se proposait de suivre ce travail ; il osait même espérer de deviner l’usage de la rate, qui est encore inconnu, quoique ce viscère, sans être rigoureusement nécessaire à la conservation instantanée de la vie, paraisse l’être à sa durée.

Mais un événement extraordinaire mit un terme aux travaux anatomiques de M. de Lassone. En choisissant parmi quelques cadavres un sujet propre à ses dissections, il croit n’apercevoir sur l’un d’eux que des signes de mort trop incertains, et il cherche à ranimer une vie qui peut-être n’est pas encore éteinte. Longtemps ses efforts sont vains ; mais la première impression l’emporte sur cette longue inutilité ; enfin, il aperçoit des mouvements qui ne sont plus équivoques. Cette mort apparente n’était qu’une crise salutaire. M. de Lassone guérit le malade ; il était pauvre ; M. de Lassone le nourrit, le console. Il craint que cette nouvelle vie ne soit pour cet infortuné qu’un présent funeste : il croit moins avoir rendu un service à l’humanité, qu’avoir contracté une dette envers elle, et il regarde comme un devoir de se charger du bonheur de celui qui doit à ses soins la funeste possibilité de pouvoir encore être malheureux. L’idée d’avoir été exposé à commettre