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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/326

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ÉLOGE DE M. DE FOUCHY.


tions, on s’exposerait à retarder leurs progrès. Ce serait ôter au génie son indépendance, et borner son essor dans une carrière trop étroite ; ce serait même troubler sa marche, puisque la chaîne des vérités qui s’appellent mutuellement, et dont la découverte devient successivement possible par celle des méthodes nouvelles, n’a aucun rapport avec la suite des vérités qui doivent devenir aussi, chacune à leur tour, d’une utilité pratique.

C’est précisément parce que les recherches difficiles, les découvertes qui agrandissent la sphère de l’esprit humain, peuvent rester longtemps inapplicables aux usages de la vie, qu’il est bon que des compagnies savantes en maintiennent le goût, rassemblent les hommes qui s’en occupent, leur offrent des récompenses, les encouragent enfin en fixant sur eux les regards, en leur assurant l’estime de ceux qui ne sont pas en état de les juger. Si ces sociétés elles-mêmes paraissaient accorder la préférence aux travaux qui se rapportent à la pratique, qui déjà donnent une gloire plus populaire et réunissent plus de facilité à l’espérance d’avantages plus grands, les sciences seraient menacées d’une langueur qui bientôt s’étendrait jusque sur les arts même auxquels on les aurait imprudemment sacrifiées. D’un autre côté, il résultait de l’heureuse réunion des artistes et des savants, que ceux-ci devenaient en quelque sorte d’utiles intermédiaires entre les savants qui ignorent les arts, et les artistes qui n’ont pas pénétré assez avant dans le sanctuaire des sciences. Tantôt discutant avec les savants les principes