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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/33

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ÉLOGE DE M. EULER.


à faire sur une question importante, peut pousser la patience et l’opiniâtreté du travail.

L’astronomie n’employait que des méthodes géométriques ; M. Euler sentit tout ce qu’elle pouvait espérer des secours de l’analyse, et il le prouva par des exemples qui, imités depuis par plusieurs savants célèbres, pourront un jour faire prendre à cette science une forme nouvelle.

Il embrassa la science navale dans un grand ouvrage auquel une savante analyse sert de base, et où les questions les plus difficiles sont soumises à ces méthodes générales et fécondes qu’il savait si bien créer et employer : longtemps après, il publia, sur la même matière, un abrégé élémentaire de ce même traité, où il renferme, sous la forme la plus simple, ce qui peut être utile à la pratique, et ce que doivent savoir ceux qui se consacrent au service de mer. Cet ouvrage, quoique destiné par l’auteur aux seules écoles de l’empire de Russie, lui mérita une gratification du roi, qui jugea que des travaux utiles à tous les hommes avaient des droits à la reconnaissance de tous les souverains, et voulut montrer que même aux extrémités de l’Europe, des talents si rares ne pouvaient échapper ni à ses regards ni à ses bienfaits. M. Euler fut sensible à cette marque de l’estime d’un roi puissant, et elle reçut un nouveau prix à ses yeux de la main qui la lui transmit : c’était celle de M. Turgot, ministre respecté dans l’Europe, par ses lumières comme par ses vertus, fait pour commander à l’opinion plutôt que pour lui obéir, et dont le suffrage, toujours dicté