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ÉLOGE DE M. DE BUFFON.

Chacune de ces traductions est précédée d’une préface : M. de Buffon a obtenu depuis, comme écrivain, une célébrité si grande et si méritée, que les essais de sa jeunesse doivent exciter la curiosité. Il est naturel d’y chercher les premiers traits de son talent, de voir ce que l’observation et l’exercice ont pu ajouter ou corriger, de distinguer, en quelque sorte, les dons de la nature et l’ouvrage de la réflexion. Mais on ne trouve dans ces préfaces qu’un des caractères du style de M. de Buffon, cette gravité noble et soutenue qui ne l’abandonne presque jamais. Son goût était déjà trop formé, pour lui permettre de chercher des ornements que le sujet eût rejetés, et son nom trop peu connu pour le risquer. La timidité et la hardiesse peuvent être également le caractère du premier ouvrage d’un homme de génie ; mais la timidité, qui suppose vin goût inspiré par la nature, et une sagesse prématurée, a été le partage des écrivains qui ont montré le talent le plus pur et le plus vrai. Rarement ceux dont une crainte salutaire n’a point arrêté les pas au commencement de la carrière, ont pu éviter de s’égarer et en atteindre le terme.

M. de Buffon parut d’abord vouloir se livrer uniquement aux mathématiques : regardées, surtout depuis Newton, comme le fondement et la clef des connaissances naturelles, elles étaient, en quelque sorte, devenues parmi nous une science à la mode, avantage qu’elles devaient en partie à ce que M. de Maupertuis, le savant alors le plus connu des gens du monde, était un géomètre. Mais si M. de Buffon