il suffit, pour le sentir, de jeter un regard sur notre
espèce même : supposons que les nations européennes
n’aient pas existé ; que les hommes soient, sur
toute la terre, ce qu’ils sont en Asie et en Afrique ;
qu’ils soient restés partout à ce même degré de civilisation et de connaissances, auquel ils étaient
déjà dans le temps où commence pour nous leur
histoire : ne serait-on pas alors fondé à croire qu’il
est un terme que dans chaque climat l’homme ne
peut passer ? ne regarderait-on pas comme un visionnaire
le philosophe qui oserait promettre à l’espèce
humaine les progrès qu’elle a faits et qu’elle
fait journellement en Europe ?
La connaissance anatomique des animaux est une portion importante de leur histoire ; M. de Buffon eut, pour cette partie de son ouvrage, le bonheur de trouver des secours dans l’amitié généreuse d’un célèbre naturaliste, qui, lui laissant la gloire attachée à ces descriptions brillantes, à ces peintures de mœurs, à ces réflexions philosophiques qui frappent tous les esprits, se contentait du mérite plus modeste d’obtenir l’estime des savants par des détails exacts et précis, par des observations faites avec une rigueur scrupuleuse, par des vues nouvelles, qu’eux seuls pouvaient apprécier. Ils ont regretté que M. de Buffon n’ait pas, dans l’histoire des oiseaux, conservé cet exact et sage coopérateur ; mais ils l’ont regretté seuls. Nous l’avouons sans peine, et sans croire diminuer par là le juste tribut d’honneur qu’ont mérité les travaux de M. Daubenton