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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/405

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ÉLOGE DE FRANKLIN.


Pouvait-on craindre qu’une taxe légère, bien inférieure aux frais des préparatifs d’une défense, soulèverait des hommes paisibles, que leurs mœurs, leurs besoins, leurs relations de parenté et de commerce attachaient à la mère patrie ? Un acte du parlement assujettit donc les colonies américaines à l’impôt du timbre et à quelques taxes sur les denrées.

Les Américains avaient toujours été libres. Ils étaient régis par les lois anglaises ; mais ces lois étaient celles de leurs ancêtres. Ils ne les avaient pas reçues, ils les avaient apportées avec eux ; et d’ailleurs, ce qu’il y a dans ces lois de plus contraire à la liberté civile s’en était trouvé naturellement écarté ; ils n’avaient pu souffrir ni de ces restes de la féodalité, ni de ces atteintes portées au droit d’exercer librement son industrie, qui déshonorent la législation anglaise. Leurs chartes les mettaient à l’abri de tous les attentats du pouvoir arbitraire. Nulle taxe ne pouvait être levée sur eux que de leur consentement. Une égalité entière entre les hommes, une indépendance religieuse beaucoup plus grande, les rendaient réellement plus libres que les Anglais. La nécessité d’obtenir, pour leurs lois particulières, la sanction d’un gouverneur envoyé d’Angleterre, et l’interdiction d’un commerce direct avec les étrangers, étaient les seules marques de leur dépendance. Il s’agissait donc pour eux, non de conquérir leur liberté, mais de la défendre ; non de rentrer dans leurs droits usurpés, mais de les conserver [1].

  1. Il s’agissait surtout de maintenir cette maxime, que nul