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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/406

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ÉLOGE DE FRANKLIN.

Des hommes cultivant leurs habitations dispersées sur nue vaste étendue, ou occupés dans quelques villes maritimes du commerce et de la pèche ; dont la lecture, la chasse, les soins de l’hospitalité étaient les seuls plaisirs ; qui avaient placé leur bonheur dans l’exercice des vertus domestiques ; pour qui un repas, où se réunissaient quelques amis, était un jour de fête ; qui presque tous jouissaient de cette abondance des choses nécessaires, si préférable à l’éclat du luxe, et connaissaient à peine les besoins factices ; de tels hommes devaient être difficiles à émouvoir ; inébranlables dans leur résistance, ils devaient supporter avec patience des gênes que l’habitude avait adoucies, et rejeter avec horreur de nouvelles entraves. Aussi, l’acte du timbre excita une indignation générale ; mais, calmes dans cette indignation, déterminés par un sentiment trop raisonnable pour l’exhaler en vaines fureurs, ils se bornèrent, en demandant la révocation d’une loi injuste, à déclarer la résolution invariable de ne jamais s’y soumettre. Franklin fut chargé de porter à Londres le vœu de la Pensylvanie.

Le roi d’Angleterre lui avait donné, plus de deux ans auparavant, la place d’intendant général des postes de l’Amérique septentrionale. Un homme ordinaire eût pu se croire obligé de choisir entre le

    ne peut être assujetti à une taxe que ses représentants n’ont pas consentie ; et cette maxime, ils l’avaient reçue de l’Angleterre même, où elle était regardée comme inviolable : elle y avait été la première cause de l’insurrection contre Charles Ier, et la révolution de 1688 l’avait consacrée.