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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/415

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ÉLOGE DE FRANKLIN.


enchaîner les générations futures aux combinaisons de son génie, serait un tyran.

A peine la constitution de Pensylvanie était-elle terminée, que Franklin fut envoyé pour traiter avec les Canadiens. Les Américains avaient fait, devant Québec, une tentative inutile ; et ces hostilités, en rappelant le souvenir de l’ancienne animosité, ne pouvaient qu’éloigner un rapprochement également utile aux deux nations. L’intérêt des citoyens les plus accrédités dans le Canada, y opposait d’autres obstacles. Les Anglais avaient laissé aux habitants leur religion et leurs lois. Ce qui restait de noblesse française craignait de s’unir à des nations où la proscription absolue des prérogatives héréditaires était regardée avec raison comme l’égide de la liberté. Le clergé romain aima mieux être toléré et protégé par le gouvernement anglais, que de voir s’établir une liberté d’opinions toujours si effrayante pour des hommes accoutumés à dominer les esprits. Franklin ne réussit point, et le Canada resta fidèle au pays dont le gouvernement faisait espérer plus sûrement la conservation de quelques abus.

Mais c’était dans l’ancien monde que les Américains devaient trouver un appui. Les dispositions de l’Europe leur étaient favorables. La découverte de l’imprimerie avait établi une communication rapide entre des nations où le latin était la langue commune de tous les hommes instruits. Elles avaient cessé d’être étrangères l’une à l’autre, et tous les hommes qui savaient lire étaient devenus compatriotes. Pendant longtemps des disputes religieuses