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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/487

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ÉLOGE DE L’HÔPITAL.


leurs protecteurs, ou publics ou secrets. Enfin, pour effrayer ceux qui oseraient à l’avenir élever, sur les débris du peuple, l’édifice d’une fortune scandaleuse, l’Hôpital ne crut pas être injuste en recherchant la fortune des traitants. On n’avait pas encore imaginé qu’on pût être innocent en profitant des malheurs publics, et qu’une grande fortune, faite aux dépens de la nation, pût n’être pas un crime [1].

Cette conduite fit à l’Hôpital bien des ennemis : il eut tous ceux de la patrie ; mais il dédaigna également leurs offres et leurs menaces ; il ne sacrifia point à leur faveur, quelque utile qu’elle pût être, le serment qu’il avait fait au roi et à la nation : il ne voulut point, pour augmenter les richesses des courtisans, laisser errer le soldat sans paye [2] dans les provinces et les ravager, ou livrer le peuple aux traitants, brigands plus destructeurs encore.

Cependant l’édit des semestres vint fournir un [3] vint fournir un

  1. Il serait plus utile que ce genre de crime ne fût puni que par l’opinion ; il deviendrait plus rare, si ceux qui le commettent étaient aussi méprisés qu’ils sont méprisables.
  2. Voyez les poésies de l’Hôpital.
  3. Cet édit partageait le parlement en deux semestres, et créait des charges nouvelles. Des appointements fixes, payés par le gouvernement, devaient remplacer les épices. La cour n’avait songé qu’à se procurer, par la vente des nouveaux offices, un secours momentané. L’Hôpital consentit à cet édit, et se chargea même de le dresser. Il avait vu des juges rechercher, avec une avidité scandaleuse, les affaires qui devaient produire des épices considérables ; d’autres, prolonger ou embrouiller les procès, pour les rendre plus lucratifs ; quelques-uns, abuser de leur crédit pour s’arroger des épices énormes. Il crut que le peuple ga-