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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/527

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ÉLOGE DE L’HÔPITAL.


que sa propre prudence. Le roi de Navarre était un chef incommode, malgré sa faiblesse et le mépris où son caractère l’avait fait tomber ; il périt au siège de Rouen. Le connétable de Montmorency, battu et pris à Dreux, laisse au duc de Guise le commandement de l’armée, et l’honneur d’avoir tout réparé par une victoire complète [1].

Déjà il se croit maître de la France, lorsqu’une main fanatique lui ravit en un instant le fruit de tant de complots et de victoires. Sa mort fit oublier son ambition et ses fureurs. La nation pleura le héros qui avait chassé les Anglais du continent, et qui seul, sans armée, avait arrêté les vainqueurs de Saint-Quentin par le poids de son nom et l’éclat de sa renommée.

Cependant cette mort termina la guerre ; l’édit précédent fut remplacé par un édit de pacification encore plus étendu : on accorda aux protestants l’exercice de leur religion dans une ville de chaque province, et dans celles dont ils se trouvaient les maîtres à l’époque de la paix. Les gentilshommes

  1. Le prince de Condé fut fait prisonnier ; Coligny gagna la basse Normandie, sans cavalerie, avec des troupes faibles et découragées ; il était perdu si, dans sa retraite, il eût été poursuivi par l’armée royale ; mais il en imposa par son audace. Le duc de Guise n’osa poursuivre un général habile et intrépide, sans avoir assuré la tranquillité de Paris par la prise d’Orléans ; et il périt à ce siège, assassiné par Poltrot. Cet homme, religieux jusqu’au fanatisme, mais sans morale, audacieux, quoique sans courage, faisait le métier d’espion dans l’armée protestante, et ne pouvant s’illustrer par de grandes actions, il voulait du moins s’immortaliser par un crime.