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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/553

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ÉLOGE DE L’HÔPITAL.


comme d’une vile marchandise ; qui puisse voir de jeunes gens acheter des devoirs redoutables, dont les hommes les plus éclairés par l’expérience, et du courage le plus éprouvé, trembleraient de se charger ; si, dis-je, il est un homme qui puisse voir ces abus, et qu’il ne pleure pas sur l’humanité, quels raisonnements pourront le convaincre ? Il suffit aux vérités physiques d’être prouvées, mais on ne croit les vérités morales que lorsqu’on aime à les croire.

Qui ètes-vous, me dira-t-on peut-être, pour condamner un usage approuvé par Montesquieu, et que le silence de la magistrature semble avoir consacré ? Je ne suis rien ; mais j’ai pour moi la voix de la magistrature elle-même dans le temps de sa gloire, dans le temps qu’elle voyait dans son sein les de Thou, les Montagne, les la Boëtie, les du Vair ; j’ai pour moi le vœu de la nation, qui n’a cessé dans les états généraux de condamner la vénalité comme un abus également honteux et funeste ; j’ai le suffrage de l’Hôpital.

Il supprima les charges qu’on n’avait créées que pour les vendre, et qui n’étaient, dans la réalité, qu’un impôt déguisé sous un vain prétexte d’utilité publique : il réduisit à une seule les différentes juridictions royales, qui, placées dans une même ville et sur un même territoire, ne servaient qu’à exciter des querelles toujours payées par le peuple. Ces réductions devaient se faire à mesure que les places viendraient à vaquer : dans la suite, les magistrats inférieurs auraient été choisis par leurs justiciables,