ce sujet, eut encore, comme dans les autres querelles
avec les jésuites, le secret d’être plaisant, et
d’avoir le public pour lui. Peut-être Pascal s’imaginait-il n’avoir été que juste envers Laloubère, et
qu’il haïssait trop les jésuites, pour imaginer qu’il
pût y avoir chez eux de bons géomètres. Il serait
cruel d’être obligé de soupçonner Pascal de mauvaise
foi ; disons plutôt qu’il se laissa entraîner à
l’esprit de parti, seule tache qu’il faille reconnaître
dans cet homme célèbre, et qu’on doit pardonner,
surtout dans un siècle où la raison, réduite à quelques
disciples isolés et cachés, n’avait point encore
de parti. Pour ce qui regarde Wallis, comme il n’était
point question de gloire, mais d’intérêt, il est
impossible qu’un motif si bas pût animer un homme
qui avait dissipé sa fortune en aumônes. Mais ce défi
de Détouville avait été une espèce de bravade adressée
aux ennemis des jansénistes, encore plus qu’aux
géomètres. L’honneur de ce parti demandait que
l’auteur des Provinciales n’eût pas de rivaux dans les sciences, et surtout qu’il n’eût pas un hérétique
pour rival. Or, quand l’intérêt d’une secte est compromis, on ne peut plus compter sur la justice de
personne.
Pascal ne survécut que trois ans à l’impression du traité de la Roulette. Il y avait vingt ans que la vie n’était pour lui qu’un supplice ; on trouva, sur des feuilles volantes, le peu qu’il avait pu ramasser des matériaux de son grand ouvrage, quelques pensées sur la méthode géométrique, et des notes informes qui paraissaient avoir été faites dans le temps de la