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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/86

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ÉLOGE DE M. D’ALEMBERT.


naturelles qu’elles paraissent, sont un peu arbitraires, et M. D’Alembert traita le problème d’une manière plus générale et plus rigoureuse, en supposant seulement la figure peu différente d’une sphère, et la densité assujettie à une loi quelconque.

On sait que dans ces questions l’on suppose à la terre une figure telle que, si elle était fluide, ses parties resteraient en équilibre, et qu’elle conserverait la même figure, sans aucun autre changement que les oscillations produites dans la masse fluide par l’action des corps célestes. Cette supposition fit découvrir à M. D’Alembert qu’il existait pour les fluides deux états d’équilibre : l’un fixe, auquel la masse reviendrait après avoir éprouvé un petit dérangement, et l’autre non fixe, qu’un léger mouvement suffit pour détruire sans retour ; observation qui, s’étendant à toutes les espèces de corps, est très-importante dans l’application des principes de la mécanique aux phénomènes de la nature.

Telles avaient été les découvertes de M. D’Alembert, lorsqu’en 1756 l’Académie lui donna le titre de pensionnaire surnuméraire. Cette distinction, accordée à son génie et à ses ouvrages, prouve que les compagnies savantes ont quelquefois assez d’équité, ou entendent assez bien les intérêts de leur gloire, pour honorer, dans un de leurs membres, un mérite et des talents supérieurs ; si leur justice est plus lente, elle est aussi plus éclairée que celle des particuliers. Quelques académiciens, animés d’un zèle sans doute respectable par ses motifs, s’opposaient à cette violation de l’usage ; ils alléguaient les incon-