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d’amérique sur l’europe.

surpris qu’on regardât comme chimériques ces avantages, parce qu’ils n’ont pas une influence immédiate et physique sur le sort des individus. Ce serait ignorer que le bonheur des hommes réunis en société dépend presque uniquement des bonnes lois, et que, s’ils doivent leur premier hommage au législateur qui réunit à la sagesse de les concevoir la volonté et le pouvoir de les prescrire, ceux qui, par leur exemple ou par leurs leçons, indiquent à chaque législateur les lois qu’il doit faire, deviennent après lui les premiers bienfaiteurs des peuples.


CHAPITRE II.
Des avantages de la révolution d’Amérique, relativement à la conservation de la paix en Europe.

L’abbé de Saint-Pierre avait osé croire que les hommes seraient un jour assez raisonnables pour que les nations consentissent, d’un commun accord, à renoncer au droit barbare de la guerre, et à soumettre au jugement d’arbitres paisibles la discussion de leurs prétentions, de leurs intérêts ou de leurs griefs. Sans doute cette idée n’est pas chimérique ; il est si clairement prouvé que la guerre ne peut jamais être un bien pour la pluralité des individus d’une nation ! Et pourquoi les hommes qui se sont accordés si longtemps pour se livrer à des erreurs absurdes et funestes, ne s’accorderaient-ils pas un