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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 8.djvu/34

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l’influence de la révolution

jour pour adopter des vérités simples et salutaires ? Mais cette espérance est encore loin de se réaliser.

Peut-être l’abbé de Saint-Pierre aurait-il été plus utile, si, au lieu de proposer aux souverains (monarques, sénats ou peuples) de renoncer au droit de faire la guerre, il leur eût proposé de conserver ce droit, mais d’établir en même temps un tribunal chargé de juger, au nom de toutes les nations, les différends qui peuvent s’élever entre elles, sur la remise des criminels, sur l’exécution des lois de commerce, les saisies de vaisseaux étrangers, les violations de territoire, l’interprétation des traités, les successions, etc. Les différents États se seraient réservé le droit d’exécuter les jugements de ce tribunal, ou d’en appeler à celui de la force. Les hommes qui l’auraient composé auraient été chargés de rédiger un code de droit public, fondé uniquement sur la raison et sur la justice, et que les nations confédérées seraient convenues d’observer pendant la paix. Ils en eussent formé un autre, destiné à contenir les règles qu’il serait de l’utilité générale d’observer en temps de guerre, soit entre les nations belligérantes, soit entre elles et les puissances neutres. Un tel tribunal pourrait étouffer des semences de guerre, en établissant dans l’état de paix plus d’union entre les peuples, et détruire ces germes de haine et cette humeur d’un peuple contre un autre, qui dispose à la guerre et en fait saisir tous les prétextes. Souvent les ambitieux qui la conseillent, n’oseraient la proposer s’ils ne se flattaient de soulever en leur faveur l’opinion populaire, s’ils n’étaient ap-