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lettres d’un citoyen

l’ordre social, est établie par une loi, et n’est pas la suite nécessaire du mérite réel, du droit de propriété, de l’opinion, de l’importance des fonctions sociales, est une violation de ce droit. Comparez maintenant cette maxime de la raison et de la nature avec les prétentions de vos premiers ordres, de vos magistrats.

Enfin, le droit de concourir à la formation des lois est un des droits de l’homme dans l’état de société. Ce n’est pas un citoyen des États-Unis qui en contestera l’existence ; mais il vous dira que ce droit, presque nul pour le plus grand nombre, n’est important pour la prospérité publique qu’autant qu’il assure la jouissance des autres ; il ajoutera que, si ce droit n’est pas égal pour tous les citoyens, si un noble ou un prêtre y a plus de part qu’un propriétaire du nombre de ceux que vous nommez roturiers, alors ce droit cesse absolument d’exister.

Tant que l’égalité n’est pas aussi parfaite que peut le permettre la nécessité d’établir des divisions, tant qu’il subsiste une inégalité qu’on puisse regarder comme réelle, dès lors la constitution n’est plus fondée sur le droit, elle l’est uniquement sur l’intérêt de respecter la tranquillité publique, l’assurance plus ou moins fondée d’obtenir d’elle une législation propre à maintenir les hommes dans la jouissance de leurs autres droits.

Ce que tout vrai patriote doit désirer en France, c’est donc l’établissement de lois qui rendent aux citoyens la sûreté, la liberté^ la propriété, l’égalité dont vos anciennes lois les ont dépouillés. Il ne doit s’occuper de changements dans la constitution qu’au-