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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 9.djvu/147

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sentiments d’un républicain

étals généraux, un intérêt différent de l’intérêt national, plus il importe de leur donner une constitution qui réponde du résultat qu’on en doit attendre.

Dans un pays où il n’a jamais existé d’assemblée nationale, où celles qui en ont tenu la place n’ont reçu leur forme que de l’autorité du prince, où n’ayant jamais été périodiques, où n’ayant pas même été fréquentes, surtout depuis que l’invention de l’imprimerie a permis quelque communication entre les hommes dispersés, on ne peut dire qu’elles aient jamais obtenu même une sanction tacite ; où cent soixante et quatorze ans d’interruption, dans l’espace de temps pendant lequel les hommes ont passé des plus grossières ténèbres à l’aurore du jour qui est prêt enfin à les éclairer, ne permettent plus de regarder l’ancien usage comme une autorité ; c’est à la puissance publique, telle qu’elle existe, à fixer la forme d’une assemblée nationale.

Cette forme n’est point arbitraire : une telle assemblée doit représenter la nation ; et il n’est pas difficile, à tout homme de bon sens, de savoir si une assemblée représente ou non une nation. Pour être rigoureusement légitime, la représentation doit être égale ; mais si elle l’est plus que ne l’a jamais été aucune assemblée de la même nation ; si l’inégalité qui peut y rester est de nature à être facilement détruite, alors ceux à qui cette inégalité est défavorable, mais qui obtiennent plus qu’ils n’ont jamais obtenu, peuvent ne pas demander davantage, et attendre du temps et du progrès des lumières une justice plus exacte.