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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 9.djvu/161

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loi ; que les représentants du peuple n’ont, pour obtenir cette réforme, que des moyens indirects qui blessent également la raison, la dignité nationale et l’ordre public. Mais l’Angleterre est surtout soumise au despotisme indirect, parce que la chambre des communes qui devrait, par la loi, représenter la nation, ne la représente pas dans la réalité ; qu’elle n’est qu’un corps aristocratique dont quarante ou cinquante personnes, soit ministres, soit pairs, soit membres des communes, dictent les résolutions.

IV.

Ces deux genres de despotisme sont presque toujours réunis. En Turquie, on est soumis au despotisme direct du sultan et du corps des gens de loi, dont il est obligé, au moins par l’usage, de prendre l’avis, et même, dans certains cas, d’obtenir l’autorisation, et qui, ayant d’ailleurs l’autorité d’interpréter les lois civiles, sont les vrais législateurs ; mais le despotisme des janissaires n’est qu’indirect. Ce n’est pas en vertu d’une loi expresse, d’un usage consacré, que le sultan est obligé de céder à leur volonté. Dans certains pays, la populace de la capitale exerce un despotisme indirect ; dans quelques autres, les chefs de la nation se sont mis dans la dépendance des gens à argent ; les opérations du gouvernement dépendent de la facilité d’obtenir d’eux des fonds d’avance ; ils forcent de choisir les ministres qui leur conviennent, et alors le peuple est soumis au despotisme des banquiers.