Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 9.djvu/438

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X.

Enfin, simple Citoyen, n’ayant reçu aucun pouvoir, et obligé de me soumettre aux lois qui seront établies, je m’interroge moi-même, et je me demande quels sont ici mes intérêts ? N’est-ce point n’être pas soumis à une Constitution qui viole quelqu’un de mes droits, et non de n’être pas soumis à une Constitution dont quelques articles blessent mes opinions.

De quelque manière qu’elle fût faite, il est vraisemblable qu’il y en aurait beaucoup que je n’approuverais point. Mais est-ce la pluralité de ceux qui peuvent avoir une opinion, ou la pluralité de ceux à qui les Citoyens ont accordé leur confiance qui doit ici l’emporter ? Suis-je bien sûr, moi qui n’ai point obtenu cette confiance, de juger le travail des Représentants avec une entière impartialité ? Ne serais-je point entraîné vers de fausses idées de perfection par la vanité de paraître plus digne de l’honneur qui m’a été refusé ? Est-il bien certain que de légères imperfections dans la Constitution fassent dans les vingt ans pendant lesquels elle peut légitimement subsister, sans pouvoir être réformée, plus de mal qu’il n’en résulterait d’un retard peut-être de plusieurs années, pendant lequel la France serait sans Constitution, ou n’aurait qu’une Constitution incertaine ? Si mes droits, si ceux de mes concitoyens sont blessés, sans doute je dois les réclamer avec force ; je ne dois pas craindre de retarder l’é-