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étudier, mais à se rendre digne de les corriger ; il ne peut exister de tems où le respect pour la tranquillité publique puisse défendre de soumettre les lois à un examen sévère, d’en montrer les dangers, d’en combattre les principes, d’en solliciter la réforme : vous faites perdre aux loix, dira t-on, la confiance du peuple ; mais qu’est-ce donc qu’une confiance qu’il faudroit fonder sur le silence de la raison, et quel droit auroit-on de tromper les hommes en empêchant qu’on les avertisse de ne pas accorder cette confiance à de mauvaises lois. Ceux qui conseillent le crime sont coupables, ceux qui discutent les lois remplissent un devoir ; qu’on cesse donc de confondre le crime et la vertu en les enveloppant dans les mêmes calomnies des hommes si différens d’intentions et de principes, en cherchant à exciter contr’eux les mêmes ressentimens.

Autrefois on traitoit d’insensés ceux qui, présumant trop bien de la nature humaine, osoient espérer du pouvoir de la raison, la chûte des préjugés, et se hâtoient de l’accélérer. Autrefois on appelloit ennemis des lois ceux qui osoient en montrer les vices, et c’est sous le règne de la liberté qu’on voudrait con-