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Page:Condorcet - Réflexions sur l’esclavage des nègres, 1781.djvu/54

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Réflexions

proposé de déclarer libres tous les enfans qui naîtroient mulâtres. En effet, ils n’ont été mis au nombre des eſclaves que par une application ridicule de la loi romaine, Partus ventrem sequitur.

Il est ſingulier peut-être qu’une loi tyrannique, établie par des brigands sur les rives du Tibre, renouvellée par le mari d’une courtiſane ſur les bords de la Propontide, faſſe encore au bout de deux mille ans, des malheureux dans les mers de l’Amérique. Mais enfin cette loi ne pouvoit avoir qu’un motif, la certitude de la mere, & l’incertitude du pere : ici le pere est aussi certain que la mere, on sait qu’il est blanc, & libre par conséquent. La maxime, Partus colorem

    mere le devient. A l’Iſle de France l’un & l’autre sont eſclaves. M. le Gentil y a vu avec horreur des peres vendre leur propre enfant avec la mere. Le Gentil, Voyage dans les mers de l’Inde, Tome II, page 72. Voyez ce qu’il dit dans le même volume des habitans de Madagaſcar ; c’est un nouveau déclamateur, dont il faut augmenter la liſte de ceux qui ne trouvent pas que l’eſclavage des Negres soit une invention fort juſte, fort humaine & fort utile.