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sur l’esclavage des Negres

sequitur, paroît donc bien plus juſte, & (puiſqu’il faut toujours citer quelques axiomes de droit) plus conforme à cette regle ſi ancienne, que, dans les cas douteux, la décision doit pencher vers la douceur & en faveur de l’opprimé.

Nous ne voyons à cette loi, juste en elle-même, qu’un ſeul inconvénient, les traitemens barbares dont on accableroit les Negreſſes ſoupçonnées de porter dans leur sein un enfant inutile à leur maître, les cruautés qu’on exerceroit sur celles qui auroient été convaincues de ce crime, & la néceſſité d’avoir un établiſſement public pour ces enfans.

L’affranchiſſement de tous les enfans à naître, noirs ou mulâtres, a les mêmes inconvéniens. À la vérité, dans ce cas, l’intérêt bien entendu des maîtres ne ſeroit pas d’empêcher de naître des gens dont les bras doivent un jour leur devenir utiles ; mais cette idée de ſe réserver, pour un temps éloigné, un homme dont il faudroit payer le salaire, frapperoit moins un colon que la perte du travail des Negreſſes groſſes. Ainſi ces loix juſtes, dictées par l’humanité, deviendroient une ſource de crimes.