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Page:Condorcet - Sur le choix des ministres.pdf/14

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ques mois une ſociété d’agioteurs déférer comme mauvais Citoyens ceux qui oſoient entreprendre de dévoiler leurs manœuvres, ou d’en contrarier le ſuccès. Ainſi d’un côté, le droit négatif ne ſerviroit qu’à entretenir dans la Nation une turbulence nuiſible à ſa proſpérité ; de l’autre, le pouvoir exécutif emploieroit les mêmes moyens pour s’oppoſer aux réformes utiles, & pour s’emparer de beaucoup d’élections à l’aide d’un parti intéreſſé aux abus, comme en Angleterre dans la queſtion du Bill pour la Compagnie des Indes.

2o. Il vaut mieux ſoumettre la Légiſlature à l’influence de l’opinion publique qu’à celle de la Nation, lorſqu’on ne donne au vœu des Citoyens qu’une action indirecte, lorſqu’il ne s’énonce point expreſſément, & ſous une forme régulière ; parce qu’alors, ce qu’on appelle improprement vœu de la Nation n’eſt dans le fait que le cri de la multitude égarée par les hommes intéreſſés à la ſéduire.

3o. Il eſt fort inutile que la Nation prononce toutes les fois que le Pouvoir exécutif n’eſt pas d’accord avec le Pouvoir légiſlatif ; car il en peut réſulter qu’une bonne loi ſera retardée malgré l’unanimité du corps légiſlatif, ſe décidant après la délibération la plus mûre. Pourquoi d’ailleurs