Page:Congrès international des orientalistes - Verhandlungen des XIII internationalen Orientalisten-Kongresses, Hamburg september 1902.djvu/341

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Kassime Émine Bey a le courage d’insister sur cette idée audacieuse dans son livre « La femme nouvelle », et cela, au grand scandale de tous les musulmans « orthodoxes ».

Mais il ne s’en tient pas là : il prétend que la législation musulmane n’a rien compris au rôle de la femme et que, du reste, il n’est pas étonnant qu’elle l’ait traitée si durement, puisqu’elle n’a pas mieux compris certains autres côtés de la vie.

Développant son idée sur les défectuosités de la législation musulmane en général, et en particulier sur son injustice envers la femme, Kassime Émine est d’avis qu’il est indispensable de modifier ou même de supprimer, s’il le faut, la partie du code de l’Islam qui concerne la femme, si l’on veut sauver de la ruine la famille, la société et l’Empire musulman. Il faudrait pour cela, avant tout, donner à la femme une éducation analogue à celle que reçoit la femme européenne, lui enlever ce voile qui pour elle est un linceul et une marque de sa servitude. Le blâme que l’écrivain fait de cet usage barbare et la hardiesse de ses idées sont des indices d’un état d’esprit qui, jusqu’à présent, n’a jamais été remarqué dans les annales de l’Islam.

Il n’est donc pas étonnant que tous les musulmans qui se considèrent comme les gardiens des vraies traditions, se soient élevés, dans leur routine, contre les idées novatrices de Kassime Émine Bey et qu’ils l’aient accusé d’hérésie. Un de ces obscurs fanatiques que la haine poussait contre le réformateur a pu écrire dans un journal que « l’émancipation de la femme musulmane était l’un des buts que poursuivaient avec le plus d’ardeur les peuples chrétiens qui n’ont en vue que la destruction de la religion musulmane, et que, partant, tout musulman partageant de pareilles idées cesserait par là même d’être orthodoxe ».

Il va sans dire qu’une critique de ce genre n’a fait que fortifier les opinions de notre réformateur. Du reste, heureusement pour lui, ses idées ont été accueillies avec joie par les représentants de la classe civilisée des musulmans. Le premier ministre d’Égypte a envoyé à Kassime Émine Bey une lettre ouverte dans laquelle il fait montre de sa sympathie pour les idées nouvelles et où il exprime la nécessité qu’il y a de les faire